SOW Ayouba

Doctorant

Université Côte d’Azur

Email : sowayouba@yahoo.fr

Discipline : Sciences de l’Information et de la Communication

Ecole Doctorale : Sociétés, Humanités, Arts et Lettres

 

Sujet de thèse : Crises et démocraties africaines au prisme des médias radiophoniques : RFI et ses partenaires en Afrique de l’Ouest

Sous la direction de Nicolas Pélissier et de Céline Masoni-Lacroix
Première inscription en Thèse : Novembre 2018

 

Résumé :

Crises et démocraties africaines au prisme des médias radiophoniques : RFI et ses partenaires en Afrique de l’Ouest. Introduction : Intérêt du sujet : Ce projet de recherche se veut d’être une étude scientifique du système de production et de diffusion de l’information radiophonique en Afrique de l’Ouest francophone, notamment pendant les crises politico-sécuritaires. Particulièrement, à la manière dont la Radio France Internationale (RFI) et ses partenaires couvrent les événements démocratiques et crises politiques dans les pays francophones de l’Afrique de l’Ouest. Nous allons travailler sur le Mali, le Sénégal, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire et la Guinée Conakry, qui sont liés par plusieurs réalités historiques, politiques, sociologiques et linguistiques. Nous allons chercher à comprendre comment RFI, une radio française à vocation internationale informe les habitants de ces pays et comment l es auditeurs ouest-africains perçoivent ses informations. Nous sommes actuellement en négociation avec Anne ROGER, Responsable des radios partenaires de RFI en Afrique de l’Ouest pour la signature d’un contrat CIFRE. Nous devons obtenir cette bourse dans un meilleur délai. La radio est le plus influent des médias de masse en Afrique. Elle intègre facilement toutes les localités, même les plus reculées. Parce que l’Afrique est un continent d’oralité. D’après Silvain Gire, directeur d’Arte radio, « la radio est un média d’écoute ». L’Afrique est donc son terrain adéquat de diffusion. Ce travail s’intéresse à plusieurs thématiques couramment traitées par la Radio France Internationale. Ces thématiques sont indissociables de l’actualité africaine et internationale, à savoir : Les crises politiques et sécuritaires ; la question des religions ; les problèmes ethniques et communautaires ; la question des langues ; les relations diplomatiques ; la Françafrique ; l’économie des médias africains ; les questions liées à la santé, notamment : (la sexualité et la reproduction qui sont des sujets tabous dans ces localités de forte tradition conservatrice. RFI est devenue une école d’oralité pour ses auditeurs. Nombreux sont ceux qui s’informent, mais aussi s’éduquent et se cultivent à travers RFI). Nous allons analyser des émissions, journaux et magazines de RFI, accessibles en podcast sur son site afin de savoir comment RFI et ses médias partenaires traitent ces sujets fondamentaux. L’information est capitale pour une société, surtout pour l’exercice de la démocratie en période d’instabilité. L’avènement de la démocratie fut systématiquement suivi par la privatisation du secteur médiatique. On y trouve des centaines de radios privées dans chacun des cinq pays. Outre les médias privés locaux, la Radio France Internationale occupe une place de premier choix dans les anciennes colonies françaises d’Afrique de l’Ouest. Certains Africains la considèrent comme la radio de l’ancien colon, un moyen français de toujours dominer les anciennes colonies. D’autres la voient comme une source sûre d’information, indispensable aux citoyens face à la censure des gouvernements africains et à l’amateurisme des médias locaux. Nous essayerons de comprendre à l’aide d’une étude de réception, pourquoi les auditeurs de RFI la considèrent comme la radio de la France. Est-ce des bonnes perceptions de RFI qui se dit « toutes les voix du monde » et qui prône la liberté de la presse et le professionnalisme ? Quelles sont les réelles motivations de RFI dans les anciennes colonies françaises ? Est-ce que cela est perçu de la même manière par les auditeurs africains ? Beaucoup de panafricanistes souhaitent que leur pays se désolidarise de ce média ; alors qu’ils savent qu’ils n’ont pas accès à l’information en temps réel sans ce dernier pour des raisons économiques, professionnelles et surtout politiques. Elle est aujourd’hui et depuis très longtemps l’unique radio qu i fournit de l’information d’actualité nationale, internationale, sportive et dans plusieurs autres domaines en français, et en langues africaines (depuis quelques années). Toutefois, la crédibilité de certaines de ses informations reste une éternelle discussion. Certains pensent qu’elle alimente le feu pendant les crises. Nous étudierons par différentes méthodes le rôle de RFI dans le déroulement et le dénouement de certaines crises majeures de ces différents pays à un moment critique de leur histoire démocratique. Leurs instabilités politiques et sécuritaires atteignirent son paroxysme lors de ces crises politiques. Ces crises sont entre autres : La répression de la manifestation du 28 septembre 2009 en Guinée Conakry ; La crise post-électorale de 2011 en Côte d’Ivoire ; La défaite d’Abdoulaye Wade à l’élection présidentielle de 2012 au Sénégal ; La crise multidimensionnelle de 2012 au Mali ; La chute de Blaise Compaoré au Burkina Faso en 2014. Les raisons objectives : Ce sujet n’a pas encore été traité dans le cadre d’une thèse de doctorat. Les rares thèses de doctorat soutenues sur cette thématique, s’intéressent à une crise précise dans l’un des pays concernés. Aucune thèse de doctorat ne s’intéresse particulièrement à la place des médias dans les conflits sécuritaires et politiques et le rôle que jouent ces médias dans la promotion de la démocratie dans cette zone du continent. Nous n’avons trouvé aucune thèse de doctorat sur la réception de Radio France Internationale. Cette recherche sera la première. Ce sujet est toujours d’actualité en Afrique de l’Ouest et dans les autres pays francophones d’Afrique Centrale, confrontés aux mêmes problèmes de transparence de l’information, de l’indépendance des médias et du respect des principes démocratiques. Cette thèse servira de référence pour ses pays afin de trouver des solutions aux problématiques de l’information en temps de crise, car le niveau de gravité d’une crise est lié à la façon de sa c ouverture médiatique. Elle servira également de support scientifique pour RFI en tant que résultat d’une étude de réception de ses programmes en Afrique de l’Ouest. Ce travail aidera les autres scientifiques non africains à se faire une idée des réalités sociopolitiques africaines et des défis communicationnels du continent. Les gouvernements des pays concernés, les organisations internationales, les ONG, les organes de médias peuvent s’en servir pour analyser l’impact de l’information, son influence et les conséquences de sa rétention sur les populations lors des crises politico-sécuritaires et dans l’exercice de la démocratique. Ils sauront également la place que RFI joue dans l’accompagnement de la démocratie dans ses zones de diffusion à travers ses journaux et programmes adaptés à différents types d’auditeurs. Les raisons subjectives : Au vu de mon expérience personnelle de témoin oculaire de l’attaque de Konna dans la région de Mopti, j’ai vu comment les habitants en manque d’informations crédibles s’affolaient face à l’avancée des terroristes. Les rumeurs déstabilisaient tout un pays, forçant des milliers de personnes à fuir leur domicile. Pour la simple raison que les médias nationaux retenaient l’information ; les privés diffusaient des fausses informations, faisant perdre aux citoyens tout espoir. Les populations lettrées écoutaient RFI dans l’espoir de s’informer en temps réel. Ceux des autres villes du Mali s’inquiétaient considérablement pour les habitants de Mopti. Beaucoup disaient de RFI qu’elle exagère la situation. On aimerait savoir si telle accusation est connue par la rédaction Afrique de RFI. Est-ce une stratégie délibérée du correspondant qui aurait voulu aggraver la situation afin de pouvoir longtemps couvrir cet évènement ; étant donné qu’il est payé à la pige ? Outre cette expérience, j’ai eu la chance de travailler dans un média spécialisé dans la communication post-crise pendant deux ans avant de poursuivre mes études supérieures en France . Je suis actuellement à mon troisième contrat à durée déterminé à RFI, pour une période de 5 mois. Je connais assez son fonctionnement et ses programmes destinés à l’Afrique. Je travaille dans la rédaction Afrique avec tous les journalistes, correspondants et rédacteurs. J’ai accès aux archives en lignes et de la médiathèque. Je participe aux conférences de rédaction et j’assiste aux prises de décisions par rapport à la hiérarchisation des informations. J’ai eu l’opportunité de travailler à la rédaction mandingue de Radio France Internationale, une antenne basée en France, qui diffuse l’information en langue locale mandingue au Mali, au Burkina Faso, en Guinée Conakry, au Sénégal et en Côte d’Ivoire. Je suis mieux outillé pour mener cette recherche en tant qu’ancien journaliste malien ayant couvert le conflit malien, et en tant que collaborateur de RFI. J’ai pu être en contact avec l’une des dernières personnes ayant parlé aux deux envoyés spéciaux de RFI avant leur enlèvement suivi d’assassinats à Kidal. J’ai collaboré avec de nombreux correspondants pendant et après la guerre au Mali. J’ai toutes les possibilités relationnelles et professionnelles, pour mener à bien cette recherche. Apporter des propositions aux problèmes d’information et de communication au Mali et d’une façon générale en Afrique de l’Ouest, est un projet personnel qui me tient à cœur, raison pour laquelle tous mes travaux de recherche ont porté sur ces questions. En 2017, mon mémoire de recherche de master 1 portait sur : la couverture médiatique de l’intervention française au Mali. Celui du master 2 portait sur : l’influence des radios privées, médias sociaux de proximité et la problématique de leur régulation au Mali. Cette thèse de doctorat sera donc, une suite logique à mes deux précédentes recherches sur l’espace médiatique malien. Cette fois-ci avec une large ouverture sur les autres pays voisins du Mali, ayant les mêmes caractéristiques que lui. Positionnement : Les réalités socioprofessionnelles nous impliquent assez dans le sujet. Toutefois, nous avons décidé d’adopter un positionnement distancié pour ne pas nous laisser emporter par un sentiment de patriotisme ou de militantisme journalistique. À vouloir s’engager, on ne saurait savoir si on s’engage comme étant journaliste ou citoyens malien touché par les problèmes médiatiques, démocratiques et sécuritaire du Mali. En bon chercheur, nous assumons le choix de prendre de la distance pour être en position de surplomb sur notre sujet. Cela nous permettra de le traiter sans prise de position. Notre objectif est de tout entreprendre afin d’être le plus objectif que possible, bien que l’objectivité scientifique ne soit jamais un acquis. Cela n’empêche, elle demeure notre repère. Problématique : Qu’est-ce que RFI apporte de plus à ses auditeurs dans le cadre du développement des pays africains notamment le renforcement de la démocratie par rapport aux autres médias ? Pourquoi les auditeurs qui qualifient RFI de média néocolonial continuent à l’écouter ? Quel est le rôle des médias dans l’exercice démocratique des jeunes démocraties et quel rôle assure ce régime politique dans l’indépendance des médias ? Est-ce que RFI incarne la puissance de la diplomatie française dans ses anciennes colonies ? Hypothèses : Les médias radiophoniques peuvent être source d’instabilité politique quoiqu’ils soient garants de l’exercice démocratique. La Radio France Internationale est une radio que la majorité des auditeurs ouest-africains critiquent et continuer à écouter, malgré les critiques à défaut d’avoir d’autres médias puissants et professionnels. Les médias internationaux sont indispensables pour l’information crédible des populations africaines. Parce que les dirigeants africains monopolisent les canaux nationaux de diffusion. La mauvaise formation des journalistes et la dépendance des médias à des puissances politiques et économiques rendent l’information partielle et partiale, donc manipulable pour des fins politiques au détriment de l’intérêt du peuple. Méthodes envisagées : Une méthode principale et deux méthodes secondaires. Méthode principale : enquête et entretiens avec les professionnels des médias Nous allons nous entretenir au sein de RFI avec des journalistes de la rédaction Afrique, des correspondants dans les pays concernés et quelques chroniqueurs adulés par les auditeurs africains. Chez les médias partenaires de RFI, nous nous entretiendrons avec des journalistes, des directeurs de programmes et des promoteurs de radio. Nous allons nous entretenir avec des experts des médias, des acteurs politiques, des acteurs de la société civile, des victimes de certaines crises sécuritaires en Afrique de l’Ouest et des sociologues. Ces différentes personnes, acteurs et victimes de crises et opérateurs des médias répondront à des questions spécifiques et adaptées à chacune. Ils donneront leur point de vue sur le fonctionnement des médias radiophoniques (RFI) et leur rôle dans la promotion de la démocratie africaine. Ils nous fourniront des éléments pouvant analyser les faiblesses, carences et potentialités des radios. Nous allons nous entretenir avec une vingtaine de personnes physiques. Première méthode secondaire : questionnaire d’étude du public L’avis des récepteurs est fondamental dans l’évaluation d’un système d’information et de son contenu. Sans ce questionnaire, il est impossible d’étudier la réception des informations de RFI afin de dégager l’image qu’elle a bâti auprès de ses auditeurs. Nous allons mettre un questionnaire en ligne et en papier à la disposition des auditeurs pour qu’ils évaluent les informations qu’ils reçoivent de RFI et de ses partenaires. Ils pourront pour l’occasion évaluer RFI, mais aussi ses partenaires qui assurent la distribution de l’information dans leur localité. Il nous faudra au moins 500 réponses afin de pouvoir les analyser. Pour cela nous allons collaborer avec un statisticien afin de toucher toutes les couches de la société à travers une étude scientifique soigneusement élaborée. Toutes les couches de la société et toutes les classes d’âge, seront représentées dans les réponses. Nous allons nous rendre dans chacun des cinq pays pour recueillir des informations et soumettre le questionnaire aux auditeurs. Deuxième méthode secondaire : analyse de contenu Nous prévoyons une analyse des contenus radiophoniques diffusés par RFI pendant des périodes de crises, afin d’étudier leur contexte et leur condition de traitement. Nous étudierons les prises de paroles sur RFI des différents acteurs de ces crises afin de savoir s’il y a des prises de partie ; si tous les acteurs avaient droit à la parole. On vérifiera si les minorités ont droit à la parole sur d’autres médias que RFI pour se faire entendre pendant les périodes d’instabilité. On essaiera de comprendre pourquoi les journalistes locaux refusent de donner la parole à certains acteurs (rebelles, opposants) lors des crises. Cette analyse du contenu nous révélera quel rôle, peuvent jouer les médias dans le renforcement du dialogue social et le retour à la stabilité.