Séminaire de recherche
Les voies des images
Séminaire interdisciplinaire de recherche
Projet ANR CROBORA
Vendredi 15 octobre – Villa Arson
17h30 – 19h30
Visages, serendipité et intelligence artificielle
Massimo Leone – Università di Torino / University of Shanghai
Visage Monde
Marion Zilio – Critique d’art/Université Paris 8
La surproduction d’images et leur présence massive dans l’espace social a été objet de réflexion depuis les débuts du siècle dernier. La numérisation nous a ensuite invité à réfléchir à la multitude d’environnements dans lesquels ces images apparaissent, aux parcours dynamiques qu’elles effectuent et aux perspectives à adopter pour capter leurs chemins. Ce cycle de conférences vise à établir un état des lieux de la recherche et de la création dans le vaste domaine des images et de leur circulation. Il s’agira de problématiser des cas d’études où des images sont analysées, à partir de leurs conditions d’existence et sous le prisme des routes qu’elles suivent ; découvrir des nouvelles méthodes d’analyse de l’image et de ses mouvements ; comprendre les derniers avancements dans les théories et disciplines liées à leur circulation (esthétique, histoire, histoire de l’art, sémiotique, théorie critique, sciences de l’information et de la communication, études des médias, sciences sociales, digital humanities…) et, plus en général, ouvrir des nouvelles perspectives sous la forme de projets de recherche ou de création nous permettant de mieux comprendre les évolutions de l’espace du visible.
Animation : Vittorio Parisi (Villa Arson) et Matteo Treleani (UCA)
Massimo Leone – Università di Torino/University of Shanghai
L’intelligence artificielle appliquée aux images complexes relève d’un défi : conçue avant tout selon le modèle narratif de la trajectoire, elle peut facilement gagner n’importe quelle partie d’échecs avec un humain, mais elle est en difficulté en conduisant une voiture, du moins pour le moment. En effet, appliquer la logique déductive ou inductive à des systèmes extrêmement complexes peut donner lieu à des obstacles insurmontables. La sémiotique, qui hérite de la sagesse de la sérendipité orientale à travers le filtre de la philosophie moderne de Voltaire, Peirce, Eco, entre autres, peut jouer un rôle fondamental dans la refonte de l’intelligence artificielle contemporaine, qui devra nécessairement inclure une réflexion sur la sérendipité, et donc sur l’abduction, pour relever les défis de systèmes complexes et, notamment, de la « vision artificielle ». La conférence retracera l’histoire de la philosophie de la sérendipité, mettant en évidence l’importance qu’y joue un élément en particulier, le visage, à partir d’un portrait de femme adoré par l’écrivain anglais Horace Walpole — inventeur du mot « sérendipité » — jusqu’à aux visages perçus, lus, et interprétés par l’intelligence artificielle contemporaine.
Massimo Leone est ancien élève de l’École Normale Supérieure et de l’École de France à Rome, docteur de l’EPHE-Sorbonne, Professeur de Sémiotique, Sémiotique visuelle, Sémiotique de la Culture et Philosophie de la Communication auprès du Département de Philosophie de l’Université de Turin et Professeur à temps partiel de Sémiotique auprès du Département de Langue et Littérature Chinoises, Université de Shanghai, Chine. Auteur d’une quinzaine de volumes, éditeur d’une quarantaine d’ouvrages collectifs, auteur de près de cinq cent articles dans des revues scientifiques, professeur invité dans les cinq continents (Professeur invité à la Sorbonne, au Collegium de Lyon, au Centre d’Études Avancées de Paris-Seine). Bénéficiaire d’un financement ERC « Consolidator » (2019-2024)
Marion Zilio – Chercheure/Université Paris 8
Jamais le visage n’a été aussi représenté et solidement installé dans l’histoire de l’humanité ; jamais, simultanément, il n’a paru aussi menacé par le vide existentiel et la prédation algorithmique. Au sein de cet obscur écartèlement, le visage semble fonctionner contre lui-même en se consumant du dedans. Or, il n’est sans doute plus question de dedans ni même de dehors, mais de milieu, d’écologie ou de flux auxquels il s’agit de coller, de s’adapter, voire de suivre les modulations imperceptibles… Des masques aux selfies, de la physiognomonie à la reconnaissance faciale, l’histoire du visage est l’histoire d’une invention qui s’ignore. Objet de « réflexion », au double sens du terme, le visage demeure un moyen d’accéder, voire d’anticiper, les paradigmes d’une époque.
Marion Zilio est autrice, critique d’art et commissaire d’exposition indépendante.
Docteure en Esthétique, Sciences et Technologies des Arts, elle est l’autrice de Faceworld. Le visage au 21e siècle (PUF, 2018 ; Polity Press, 2020) ainsi que Le livre des larves. Comment nous sommes devenus nos proies (PUF, 2020). Elle enseigne actuellement à l’Université de Paris 8 dans l’UFR Art, Philosophie et Esthétique et a été professeure invitée à l’École Nationale Supérieure de Cinéma de Téhéran.